2020, une année « pas comme les autres », pour beaucoup d’entre-nous, faite de haut et de bas… Je ne déroge pas à la règle car pour moi, les guidages se sont interrompus avec le confinement.
Cependant, c’est quand même aussi pour moi « GUADELOUPE PÊCHE EXOTIQUE » l’année de moments particulièrement « intenses » !
En effet, en tant que pêcheur, je réalise mon 1er GRAND SLAM « made in France » ! Cette appellation, reconnue par l’IGFA (International Game Fish Association), félicite la prise le même jour en « catch and release », à la mouche, de ces 3 espèces de « poissons sportifs » : Bonefish, Tarpon et Permit. Le cadre de pêche, la combativité et « l’intelligence » de ces espèces font que ce Grand Chelem est particulièrement recherché par tous les pêcheurs passionnés !
A la fin du mois de janvier 2020, je faisais déjà prendre à un excellent pêcheur américain, le SUPER GRAND SLAM des flats, à savoir bonefish, snook, tarpon et permit en 24 H. Sur le territoire guadeloupéen, c’était déjà une première du bord, ce qui rajoute encore à l’exploit! Vous imaginez l’immense plaisir pour moi d’avoir contribué à cette page de l’histoire de la pêche à la mouche en France ! Cela faisait déjà de moi le guide le plus heureux … Aujourd’hui c’est le pêcheur qui exulte, car, sans exagération, le nombre de pêcheur français à réaliser chaque année ce rêve, peu importe la destination, doit se compter sur les doigts des 2 mains, et même peut-être d’une seule ! Le dernier Grand Slam réalisé en Guadeloupe datait de 2007 et l’avait été depuis un bateau.
Ce fût donc pour moi, l’une des plus belles journées de ma vie de pêcheur !
Serait-ce là le signe qu’un nouveau territoire se prêterait à la réalisation de ce rêve de pêche, prendre en une journée un bonefish, un tarpon et un permit !?
Retour sur ce moment unique : ce jour là, j’avais décidé en raison des conditions météos de pêcher le bonefish, justement surnommé le « fantôme des flats », ce poisson étant particulièrement connu pour se fondre parfaitement dans son environnement, et donc très difficile à voir. Le fait qu’il soit quasiment toujours en mouvement force à être particulièrement efficace dans sa rapidité d’exécution au lancer ! Il est également, proportionnellement, le poisson côtier le plus « rapide » entre tous! La taille moyenne importante des bones et la typologie des flats en Guadeloupe (un mélange d’herbes à tortues et de roches toujours coupantes) ne facilitent pas la tâche durant les combats ! Armé de ma mouche « maison », j’avançais sur le flat et restais aux aguets du moindre signe de la présence d’un bone. Après 30 minutes sans percevoir la moindre activité, je m’arrête subitement à la vue d’un school (banc!) d’une dizaine d’individus. Ceux-ci se nourrissent sur le fond et n’avancent presque plus. Ni une ni deux, malgré le vent, je lance et réussi à poser délicatement ma mouche à proximité, sans les effrayer. L’action ne se déroule pas comme prévu car à cet instant précis, une vague arrive et les poissons se mettent à « surfer » celle-ci. Heureusement, deux d’entre-eux restent atteignables. Ils décident subitement d’accélérer dans ma direction. Pour ne pas être repéré, la distance entre eux et moi ne doit plus se réduire. Ma soie est toujours posée à la surface mais plus tout à fait sur leur trajectoire. A la vue de celle-ci, ils pourraient détaler en une fraction de seconde et par voie de conséquence, effrayer définitivement tous les autres. Je saisie cette dernière chance, je recule et strippe très rapidement en même temps. Je réalise un arraché sans éclaboussure et prend soin de poser à nouveau ma soie devant ces derniers. Un des deux voit ma mouche, je strippe, il suit et boum, une belle touche, un bon ferrage et c’est parti, un combat spectaculaire ! Je parviens à éviter toutes les embûches et fini par me saisir d’un joli spécimen accusant + ou – 5 livres. Super !
Je relâche ce joli bonefish et poursuis ma quête. Mon œil aperçoit au bout de quelques minutes, plusieurs ombres qui bougent dans une bassine de sable ! En approchant, je distingue le noir de leur caudale, ce ne sont pas des bones mais un school de permits ! Ces derniers ont la solide réputation d’être très difficiles à faire mordre, certainement à la mouche le poisson le plus farouche au monde ! Ils sont en plus de redoutables combattants ! Ceux-ci, petits, sont donc en plein milieu du flat. Cela arrive rarement car cette espèce aime avoir la possibilité de s’évanouir dans les eaux profondes à la moindre alerte de danger. Ils ont l’air d’avoir trouvé quelque chose à manger et la profondeur de cette crevasse fait qu’ils y restent. Peut-être pas pour très longtemps ! Ma mouche perso, une imitation de crevette, m’a déjà permise de prendre quelques-uns de ces fameux Permits par le passé. De peur de ne plus les revoir, je décide de les attaquer sans plus attendre. La hauteur d’eau autour de cette bassine est très faible. A peine 20 cm. Le but de la manœuvre est donc de poser à l’intérieur de cette bassine de 3 mètres carré mais pas en plein milieu, sans quoi j’effraierais tout le monde. Je lance et pose d’abord un peu trop court, ma mouche ne parvient pas à dépasser le rebord, je dois stripper vite pour ne pas que celle-ci s’accroche dans les herbes. Au bout du 3ème lancer je parviens cependant à mettre un petit permit au sec.
Après une photo et la relâche, je regarde à nouveau la crevasse et vois que le reste du groupe est encore là ! Je les attaque à nouveau et réussi à en prendre un deuxième !!
Je suis content mais j’espère à ce moment là pouvoir attraper un permit un peu plus gros. J’essaierais encore pendant une trentaine de minutes d’en repérer un mais malheureusement sans succès. En effet, les deux permits que j’ai pris ce jour là étaient tout petits. J’observe régulièrement des permits « trophées » de plus de 10 kilos ici en Guadeloupe ! Mais il parait que la taille ne compte pas/lol ?! Et puis, un permit est un permit, non ?
Dans ce cas précis, ça m’arrange car je me dis que l’inaccessible « Inshore Grand Slam » devient peut-être à ma portée ?
Ni une, ni deux, le temps de changer de matériel et de reprendre des forces (pour ça rien de tel qu’un bon Bokit typiquement créole !) me voilà parti à la recherche de la 3ème et dernière espèce : le tarpon.
Le fabuleux « silverking », le « roi d’argent » comme le surnomme les américains, est un des prédateurs qui fait rêver plus d’un pêcheur sur la planète. Sa magnifique robe argentée n’a d’égale que son habileté, sa vélocité et sa férocité au combat ! Prendre un tarpon à la mouche du bord est un challenge qui demande encore une fois de maîtriser de nombreux paramètres de la pêche sportive ! Mes rencontres avec ce poisson, qui plus est avec de gros sujets de plus d’1 mètre 50, dont on entendait très peu parler il y a encore 4/5 ans en pêche du bord, commencent à être nombreuses, et je commence à vraiment bien comprendre leurs habitudes et leurs réactions.
En arrivant au bord de l’eau, je ressens cependant, vu l’exploit envisageable, une certaine pression. Je pêche depuis des rochers et je suis au bon endroit pour avoir une chance d’en attaquer un. Après seulement une vingtaine de minutes à observer en « faisant le héron » et à lancer en pêchant l’eau, je vois déjà un premier tarpon « rouler » en surface à bonne distance. A peine le poisson est-il monté, qu’il disparaît dans l’eau légèrement teintée ! J’anticipe sa trajectoire et lance quelques mètres devant l’endroit où je l’ai vu. Je laisse un peu couler, je strippe, j’arrive maintenant au ras de la berge, je vois ma mouche remonter en surface, je fais une dernière tirée avec ma canne au cas où … et là, un beau tarpon surgit du fond, comme un éclair, et se saisit de ma mouche ! Je ferre, mais mal, surpris que j’ai été par la touche au dernier moment. Il fait son premier rush, saute comme le fait « tout tarpon qui se respecte », secoue la tête et… se décroche immédiatement ! Aaaahh non !!! Il était là ! Il faut savoir que lorsque l’on pêche cette espèce, on termine en moyenne le combat par une capture que dans une ou deux occasions sur 10. Avec l’expérience, on peut un peu améliorer cette moyenne et la porter peut être à 1 poisson sur 5, quelquefois moins ! Bon, espérons que ça ne soit que partie remise ?! Je me remets à pêcher. Une dizaine de minutes s’écoule et j’entrevois, dans l’eau trouble, deux silhouettes sombres de belle taille juste sous la surface. Elles se déplacent lentement droit sur moi ! Bon, j’ai de la chance, il ne faut pas se louper !!! Je lance, la mouche atterrie devant l’un des deux, je strippe, il suit, boum, grosse touche, gros ferrage, réussi cette fois-ci ! C’est reparti ! Le poisson entre dans un combat intense, il saute et me prend du fil, je fini sur le backing ! S’en suit un combat d’une bonne demi-heure avec ce tarpon de près d’une trentaine de livres, mais après en avoir déjà combattu de bien plus gros (1,70m./120 lbs)), je dois dire que celui-ci ne m’inquiète pas vraiment ! Je le sors enfin de l’eau. VICTOIRE !!! Mon Grand Slam est réalisé !
Je suis sur un petit nuage !
Ce récit, dont je vous ai ici fait part, n’a pas l’intention de me faire apparaître « plus malin » que d’autres, mais juste de relater toute la joie que procure le fait de vivre l’intensité d’une journée pareille.
Chacune de ces espèces nécessite son lot de paramètres à découvrir afin de les faire réagir devant les mouches et venir à bout de ces combattants surpuissants. Dans ce texte, on comprend qu’à plusieurs reprises la réussite a tenu à peu de choses, des détails qui font que l’on « conclu » positivement ou que l’on se « plante » ! La traque quand on pêche spécifiquement à vue (c’est à dire en voyant les poissons avant de les attaquer) décuplant l’excitation de la capture et la montée d’adrénaline n’en étant que plus forte.
Je ne suis pas peu fier également car mon amie, présente avec moi ce jour là, a décroché son 1er bone. Après seulement quelques heures de pratique de pêche à la mouche de toute sa vie et grâce peut être aux modestes conseils d’un guide qui traînait dans le coin… elle a réussi à faire mordre un joli bonefish à sa mouche et a débuté le combat. Le fond rocheux a malheureusement mis fin à ces premières sensations en cassant son bas de ligne. Ce sera certainement pour une prochaine fois !
C’est ainsi que se termina cette journée mémorable. J’espère vous avoir donné, à vous aussi, l’envie de relever ce magnifique défi de pêche exotique en Guadeloupe.
Merci de m’avoir lu !
« A dan dot soley » pour vous faire vivre de nouvelles aventures halieutiques !!!
Gavin LEBRETON
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